Le zen est
une forme de bouddhisme mahāyāna qui insiste particulièrement
sur la méditation,
ou « illumination intérieure ».
Le mot zen est la romanisation du
mot japonais 禅 (« méditation
silencieuse »), traduction du mandarin 禪 chán,
lui-même emprunté au sanskrit dhyāna ou
plutôt au pâli jhāna (« recueillement
parfait »).
En français, le mot zen est aussi utilisé pour
signifier un état de tranquillité, d'indifférence à l'agitation
du monde et devenu dans le langage courant un adjectif synonyme
de « serein ».
Histoire
Origines
La légende de l'origine de la tradition zen et de la
lignée de ses maîtres remonte à un sermon
du Bouddha Shākyamuni à ses
disciples alors qu'ils étaient réunis sur le pic
des vautours, relaté dans le Sūtra
Lankavatara. Pour tenter d'expliquer un point de
son enseignement, il se contenta de cueillir silencieusement
une fleur d'Udumbara.
Aucun des disciples n'aurait compris le message qu'il tentait
de faire passer, à l'exception de Mahâkâshyapa,
qui aurait souri au Bouddha.
Celui-ci lui aurait alors dit devant l'assemblée qu'il
lui avait ainsi transmis son trésor spirituel le plus
précieux. C'est une préfiguration de la description
du chan que l’on prêtera à Bodhidharma : « pas
d’écrit, un enseignement différent (de tous
les autres), qui touche directement l’esprit pour révéler
la vraie nature de bouddha » (« 不立文字、教外別傳, 直指人心,見性成佛 »).
Liste des patriarches du zen
Liste rapportée par la tradition des vingt-huit patriarches
de l’école avant son arrivée en Chine et
liste des sept premiers patriarches du chan chinois :
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- Shâkyamuni
- Mahâkâshyapa
- Ananda
- Shanavâsa
- Upagupta
- Dhritaka
- Micchaka
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- Bouddhanandi
- Bouddhamitra
- Bhikshu
Parshva
- Punyayashas
- Ashvagosha
- Bhikshu
Kapimala
- Nâgârjuna
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- Kânadeva
- Arya
Râhulata
- Sanghanandi
- Sanghayashas
- Kumârata
- Jayata
- Vasubandhu
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- Manura
- Haklenayashas
- Bhikshu
Simha
- Vâshasita
- Punyamitra
- Prajñâtara
- Bodhidharma
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De l'Inde à la Chine
Bodhidharma,
vingt-huitième patriarche dans la filiation indienne,
serait venu en Chine autour
de 520.
Les différents textes chinois qui le mentionnent ne s’accordent
pas exactement sur son origine (Kânchîpuram au
sud de l’Inde ou Perse),
ni sur sa route (arrivé par l’Ouest ou par un port
du Sud-Est). On lui prête un attachement particulier pour
le Sūtra
Lankavatara, et la première école chan constituée
est connue sous le nom d'école Lankâ (楞伽宗).
Une légende attestée à partir
du XIe siècle au
monastère de Shaolin en
attribue la fondation à Bodhidharma, en faisant ainsi
l’initiateur des arts
martiaux d'Extrême-Orient.
Néanmoins, bien qu’il existe au Kerala un
type de yoga offrant une certaine similitude extérieure
avec le kung-fu,
des gymnastiques de type qigong semblent être
mentionnées sur des textes chinois datant du Ve siècle
av. J.-C, et les arts martiaux au mont Song ont
précédé Bodhidharma, si tant est qu'il s'y
rendît jamais.
De la Chine à la Corée
Au IXe siècle,
le bouddhisme chan, appelé Son en
Corée, fut intégré au bouddhisme étatique
déjà présent depuis le IVe siècle.
Le Son coréen
pratique la prosternation, le chant, la méditation assise.
Il utilise des mantras et
des gong'an ou kōan (nom
japonais).
De la Corée au Japon
Du VIe au XIIIe siècle,
le bouddhisme zen fut importé de Chine au
Japon via
la Corée, par vagues successives. C'est au XIIIe siècle que
le moine Dogen 道元 importa
le zen Sōtō (曹洞,
en mandarin caodong),
et le moine Eisai (栄西,
parfois appelé Yōsai) le zen Rinzai (臨済, Linji en
mandarin).
Ces deux écoles, comme en Chine à partir des
Song,
constituent encore aujourd'hui avec l'école obaku le
paysage du zen japonais. C'est le zen Rinzai qui va cependant
s'imposer, du moins politiquement dans un premier temps, avec
la mise en place du système dit des Cinq Montagnes où cinq
temples chapeautent tous les autres. En fait il y aura dix temples,
cinq à Kyōto et
cinq à Kamakura,
qui varieront au fil du temps. Le courant zen et la pratique
du zazen (méditation
assise pratiquée pour atteindre l'éveil) eurent
beaucoup de succès au Japon et s'accompagnèrent
du développement par les moines de plusieurs arts et techniques,
soit directement importés de Chine, soit créés
localement en intégrant des éléments du
nord de la Chine et de la Corée.
On peut citer comme exemple l'usage du thé ou
l'esthétique simple et dépouillée. Le zen
japonais est aussi fortement influencé par le taoïsme,
dont on retrouve certains symboles et notions.
Filiation chinoise (chan) des écoles japonaises :
- Sōtō se
rattache à caodong (曹洞宗)
fondé par Dongshan
Liangjie (洞山良价 -
869).
- Rinzai se rattache à la
lignée de zhishen (智詵 -
702),
deuxième disciple de Huineng selon
la monographie de l'école Lankâ (楞伽人法志),
par l'intermédiaire de Mazu Daoyi (馬祖道-
788), Baizhang
Huaihai (百丈懷海, Hyakujo
Ekai en japonais, 720-814),
Huangbo Xiyun (黃檗希運)
et Linji Yixuan (臨濟義玄 Rinzai
Gigen en japonais, - 866).
- Beaucoup plus tard ōbaku,
fondé par Yinyuan
Longqi (隱元隆琦, Ingen
Ryuki en japonais, 1592-1613),
fera également remonter sa lignée à Huangbo
Xiyun, maître de Rinzai.
- Ummon de
réclame de Yunmen
Wenyan (雲門文偃, Ummon
Daishi en japonais, 864 - 942).
Approche
On peut grossièrement dire que le zen Sōtō met
l'accent sur la pratique de zazen (de za assis
et zen méditation) et de shikantaza (seulement
s'asseoir) alors que le zen Rinzai insiste plus sur les kōan,
apories, paradoxes à visée
pédagogique.
Zazen est l'éveil (satori) :
la pratique elle-même est réalisation; pratique
et éveil sont comme la paume et le dos de la main. Il
suffit de s’asseoir immobile et silencieux pour s’harmoniser
avec l’illumination du Bouddha. Néanmoins, selon
la logique zen, même l'éveil ne saurait être
un but en soi.
Les kōan (école
Rinzaï) sont des propositions le plus souvent absurdes ou
paradoxales que pose le maître et que le disciple doit
dissoudre (plutôt que résoudre) dans la vacuité du
non-sens, et, par suite, noyer son moi dans une absence de tensions
et de volonté, que l'on peut comparer à la surface
parfaitement lisse d'un lac reflétant le monde comme un
miroir.
Comme toutes les versions sinisées du bouddhisme, le
zen appartient à l'ensemble mahâyâna qui
affirme que chacun possède en soi ce qu'il faut pour atteindre
l'illumination. Certaines écoles (tiantai, huayan) considèrent que chacun et toute chose est « Nature de
bouddha ». La position zen, plus proche du
courant philosophique idéaliste yogaçara,
considère que la seule réalité de l'univers
est celle de la conscience ; il n'y a donc rien d'autre à découvrir
que la vraie nature de sa propre conscience unifiée.